Que faisait-elle,
seule, sur ce quai complètement désert en ce dimanche matin de
février ?
Je l’observais depuis
mon lit douillet. La fenêtre de ma chambre donnait, par delà mon
minuscule jardin directement sur la plate forme de la gare. Je savais
qu'il n'y aurait pas de train avant deux bonnes heures. Pourquoi
était-elle ici autant en avance ? Il faisait froid et par
moments, une légère bruine embrouillait le ciel.
J'avais décidé de faire la grasse matinée et après un café pris à la cuisine, j'étais allée me glisser à nouveau sous ma couette. Bien calée au creux de mes oreillers, j'avais repris la lecture de mon roman abandonné la veille quand je l'aperçus. Elle était grande, vêtue d'un manteau gris foncé qui recouvrait à demi ses bottes. Elle avait enfoncé sur sa tête un doulos grenat d'où dépassait une opulente chevelure brune. Elle portait en bandoulière une sacoche noire qu'elle ouvrait de temps à autre pour en extirper un mouchoir ou d'autres choses que je ne pouvais discerner.
Elle allait et venait le long des rails sans doute pour se réchauffer. Une petite valise était abandonnée près de la porte de la salle d'attente fermée depuis des années. Comment était-elle arrivée là ? Tout le monde se connaissait ici et je ne l'avais jamais vue auparavant. Qui était-elle ?
Elle s'arrêta tout à coup juste en face de moi. Elle venait de m'apercevoir derrière mes carreaux. Je me sentis quelque peu gênée. Comme si le fait de la regarder à son insu était une violation de sa personne. Elle ne sembla pas contrariée. Bien au contraire. Elle m'adressa un sourire. Elle sortit de son sac une cigarette qu'elle alluma et reprit sa marche solitaire.
J'eus soudain envie de l'interpeller. De lui dire qu'il n'y aurait pas de train avant longtemps. Je pensais – idée un peu folle – l'inviter à prendre une boisson chaude chez moi. Dans cette optique je me levai et m'habillai rapidement. Un coup d'œil à la fenêtre m'apprit qu'elle avait renoncé à sa déambulation. Elle était immobile près de son bagage et tenait son téléphone près de son oreille. Elle parla longtemps. Je ne pouvais évidemment pas voir l'expression de son visage mais je devinais, aux gestes brusques qu'elle effectuait de temps à autre que la conversation avec sa correspondance était animée.
J'avais résolu de mettre un terme à ma curiosité en tirant mon rideau quand je la vis soudain devant le portail de ma courette, le visage levé vers moi. Elle me fit signe d'ouvrir ma fenêtre. Ce que je fis, intriguée. Elle me paraissait tout à coup en panique et c'est des sanglots dans la voix qu'elle me cria :
- Ouvrez-moi.
Ouvrez-moi s'il vous plaît. Ils arrivent. Vite.
- Ils arrivent ?
Qui ? Que craignez-vous ?
- Ils me cherchent.
Ouvrez. Par pitié !
Je n'en croyais pas mes oreilles. Recherchée ? Peut être par la police ? Qu'avait-elle fait ? Qu'avait-elle à se reprocher ? Et moi comment allais-je aborder ce problème ? Je me maudis de mon intérêt malsain pour cette femme. J'étais prise au piège et ne savais pas comment m'en sortir. Fallait-il ouvrir ma porte ? Ou bien me terrer chez moi et faire la sourde oreille ? L'idée me vint d'appeler la gendarmerie de mon village. Ce que je fis sans plus tarder.
Mon coup de fil passé, je m'approchais de la fenêtre de ma cuisine pour surveiller l'arrivée du fourgon bleu. Incroyable ! L'inconnue s'était subitement volatilisée. Plus personne sur le quai de la gare. Avais-je rêvé ? Non. En attestait un chapeau de feutre grenat gisant dans la poussière.
M’est avis que nous n’allons pas tarder à retrouver ces deux femmes aux portraits si bien campés ! Ah ! J’allais oublier le personnage principal : le doulos ! Cette ambiance de quai de gare n’est pas sans m’évoquer un de mes films français préférés : "Espion lève-toi" avec Lino Ventura et Michel Piccoli...
RépondreSupprimerDéjà deux participations où le récit reste en suspens ! Je continue mon enquête : "AU SUIVANT !"
RépondreSupprimerla fascination pour une femme andre breton dans ton ombre !!!
RépondreSupprimerÇa démarre très fort ce polar ! Comment on dit "Indic" au féminin ? Indique ? Indique-moi le moyen de connaître la suite ?
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