samedi 19 juillet 2025

L'Horloge comtoise (Joe Krapov)

 





« Si tu n’as pas une horloge comtoise à cinquante ans, tu as raté ta vie ! ».

Je ne sais pas qui c’est ce gars-là qui a pondu ça mais à force de faire le Jacques et d’énoncer des sentences aussi idiotes à l’heure ou l’heure figure sur tous les téléphones et les ordinateurs, on voit bien qu’il n’a pas le sens pratique. D'un autre côté, certain des types à qui il a fourgué ses recettes se sont retrouvés entravés par un bracelet... électronique !

La pendule trône dans la salle à manger du nonagénaire. Elle a été achetée par son grand-père. Il y a une histoire concernant cet achat ou le trajet pour la ramener à la maison mais je l’ai oubliée.

C’est que chez ces gens-là, Monsieur, comme dirait un autre Jacques qui lui n’étais pas une brèle, on écrit mais on ne raconte pas sa vie… sauf à table.

C’est dommage. On a entendu plein d’histoires sur Louis de Funès, Achille Zavatta mais il n’y a pas de prescription quand il y a proscription : le fonctionnaire a un devoir de réserve et n’écrira pas ce qu’il sait.

On est assez d’accord sur le fond et sur le fait que les morts sont tous des braves types.

En attendant, tandis que la pendule au salon disait oui disait non, le temps a passé, les générations se sont suivies et ne se ressemblent pas. Tout ce qui s’est entassé dans un innommable désordre et dans les différentes pièces de cette maison, ça va nous rendre fous et folles.

Moi je ne suis pas ici pour raconter ma vie mais maintenant que j’ai vu « en vrai » la table du Dr Zigmund, je suis prêt à m’allonger sur son divan et à dire « J’ai mieux chez moi » : j’ai la sacoche de Marie-Louise, les deux boîtes de gelati Motta de Geneviève, les plaques de verre de Paul-André, sa boîte Alsace avec les mini-albums, le classeur vert, l’album rigide, la boîte archives, la boîte rouge, l’album rouge, l’album marron, les fiches perforées, la boîte marron, la boîte à chaussures Impulse…

J’ai descendu tout ça dans la loggia et sur mon bureau, histoire de retrouver les photos originales d’«Il était une fois» et de «Chemins d’enfance» et de me servir de tout ça pour présenter un de ces jours – EN NUMÉRIQUE ! - une photothèque rangée chronologiquement.

Comme dirait Fernand Raynaud, « Ça va prendre un certain temps ». La comtoise va encore faire sonner un certain nombre d’heures.

Comment ?

Ah oui, c’est vrai elle ne marche plus. On l’a gardée parce que chez ces gens-là, Monsieur, on ne jette rien : tout peut toujours servir !

Ne serait-ce qu’à pondre un billet pour le Défi du samedi !
 
  

6 commentaires:

  1. Deux corrections s'imposent :

    Jacques qui lui n’était pas une brèle
    La Comtoise

    Merci d'avoir rectifié de vous-même !

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  2. Bravo à vous pour ce billet bien pondu.

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  3. j'aime cette façon d'utiliser tout ce que tu sais pour en faire un bouquet !

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  4. lecrilibriste19/07/2025 09:47

    anonyme = ecrilibriste

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  5. Jacques Brel, Louis de Funès, Fernand Raynaud, Freud… Les références convoquées créent un cadre générationnel complice, jamais pesant. Elles ancrent le texte dans une mémoire collective joyeuse et douce-amère.Un texte fougueux, drôle, et profondément humain, porté par une langue vive, intelligente et sensible. Une comtoise pour décor, un bazar pour mémoire, un esprit brillant pour narrateur : tout y est.

    Bravo ! On en redemande. 🎉

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  6. L'archiviste fou a encore frappé (à la porte de la comtoise qui ne pipe plus mot...) !

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Ont examiné le vitrail en détail

       TOKYO ;