
(*)
Un bonbon rêvé … cling clong … et encore un autre
Dans la vieille cité, nous marchions main dans la main à l’ombre des grandes murailles grises. Des pierres posées par des géants sanguinaires, étranglantes. Des pierres sombres, ruisselantes, hérissées de feuilles arrondies comme des milliers de cœurs meurtris. Des pierres dressées, barrant le ciel, enserrant le soleil. À l’ombre de souterrains sans fond, de geôles oubliées, d’escaliers de cauchemars, emprisonnés par de grosses portes en bois. Closes à jamais.
Des vents marins glaciaux, salés, envoyés au front par des marais assiégeant la ville, entouraient les tours isolées, les meurtrières sans vie, puis se reflétaient au vide des douves vertes et profondes. Enfin ils s’engouffraient par les larges portes, hurlant dans le labyrinthe des ruelles et des venelles rétrécies en y tournoyant et en s’y lamentant sans fin.
Nous soufflions un peu … Soulevant sur les murs de gros anneaux de fer scellés qui retenaient encore chaque nuit les fantômes de vieux chevaux éteints. Nous les faisions sonner. Bruits mâts de cloches disparues. Mon petit frère m’imitait. Encore un autre bonbon. Ça fera cinq ! Souriais-je. Le rituel secret, sacré, durait sur notre chemin de ronde jusqu’à l’école, et nous engrangions ensemble des douceurs intimes – rêvées – sur chaque anneau de fer tinté.
Mais le lendemain matin, avant de partir à l’école, notre mère nous donnait à chacun, un seul tout petit croissant de lune fruité. Coloré, translucide, tout poisseux du sucre fondu. Elle refermait aussitôt puis remontait, bien à sa place, en haut du grand buffet, le joli bocal de verre, trésor de tous nos interdits.
PL

Et que résonnent dans la venelle les gros anneaux de fer tintés
( * ) La venelle, pas si sage, crayons de couleurs bleus et rouges, Cavalier——

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire