Athanase avait fini par s'y habituer, à ces étranges lubies qu'avaient ses moutons.
De s'organiser géométriquement, et il observait ça, d'un air mi-amusé, mi-perplexe, Athanase ne commença vraiment à s'inquiéter qu'un soir où l'ensemble du troupeau se disposa en ligne, et, progressivement, se mit à osciller. Pour le dire précisément :
la ligne moutonnière bougeait à la manière de vagues se propageant d'un bout à l'autre de la colonne, et certains moutons étaient contraints, pour assurer la continuité du mouvement ondulatoire, d'opérer des freinages extrêmement brutaux pour reprendre aussitôt, à toute bringue, leur course dans la direction opposée, avant de freiner de nouveau pour repartir dans l'autre sens, et ainsi de suite.
C'est ce soir-là qu'Athanase s'était décidé à appeler Jacques, le vétérinaire avec lequel il avait l'habitude de traiter, pour connaître son avis sur le phénomène.
Le lendemain soir, quand le vétérinaire vint, les moutons étaient disposés selon deux octogones réguliers, auxquels, par de petits pas de côté, ils impulsaient des sortes de battements synchrones et réguliers. Jacques n'osa pas donner un avis ferme :
certes la chose n'était pas habituelle, elle était peut-être même inédite, mais, dans tous les cas, elle ne relevait pas de sa compétence. Il ausculta quelques brebis pour vérifier qu'il n'y avait pas de colonisation parasitaire de l'une ou l'autre des bêtes, mais fut formel sur ce point :
les moutons d'Athanase étaient en parfaite santé. Cependant, Jacques comptait, parmi ses connaissances, un mathématicien spécialiste des constructions fractales,
— Le déplacement de vos moutons, Athanase, ne doit rien au hasard, et il ne doit rien non plus à un quelconque comportement social que l'éthologie saurait expliquer. D'après ce que j'ai pu en voir en vidéo, vos moutons sont en réalité en train de tenter de produire, par la méthode d'exhaustion d'Archimède, une Approximation de la quadrature du cercle.
— Ça signifie quoi, professeur ?
— Cela signifie deux choses : la première, c'est que vos moutons ne connaissent, manifestement pas la méthode analytique, qui donne de bien meilleurs résultats pour la résolution de ce genre de problèmes.
La seconde, c'est que la performance reste tout de même particulièrement impressionnante, parce que ce sont des moutons
je ne vous apprendrais rien en vous disant que des moutons ne sont pas censés travailler à une approximation de la quadrature du cercle.
Son ami herboriste qui passait par là éclata de rire
C’est encore le coup du Cynor(r)hodon je t’avais bien dit de raser la haie voilà ce qui arrive aux moutons quand ils ingèrent cette plante !
— … »
Résoudre la quadrature du cercle en dansant, j'y avais pas pensé, faudra que j'essaie ! ;-)
RépondreSupprimer"Aphrodisiaque" ? Mais en quoi ?...
RépondreSupprimerje comprends ton étonnement les math et la libido ça se conjugue mal
SupprimerLes deux sont complexes !😅
SupprimerEt même s'il n'y en eut qu'un pour croquer dans le cynorrhodon on sait qu'il aurait donné une impulsion immédiatement suivie par le troupeau. Je ne connaissais pas ton histoire des moutons d'Athanase merci Tokyo :-) - mais je connais celle des moutons de Panurge. ;-)
RépondreSupprimerCe n'est quand même pas là une raison valable pour voir rouge contre la science et les scientifiques ! Que de génie encore, cette semaine, dans tes alpages ! ;-)
RépondreSupprimerJ’aime beaucoup ton texte, c’est décalé joliment. Mais à nos moutons revenons : Oui, TOKYO, Le cynorRhodon l’r de mine de rien quadrature joli le cercle, toujours, c’est sûr. Ici on le voit montré avec des allumettes plutôt que des moutons, c’est plus simple pour le voir bien. Sur des lignes traçées, en pré carré de papier. Pi apparaît magique. Panurge démiuge.
RépondreSupprimerAllumettes cynoérhodées
Quelle histoire ! Et quelle imagination, Il fallait y penser !
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