samedi 19 avril 2025

Aux noms de la rose, entre chiens et loups (Cavalier)

   


 Fruit de l’églantier, cynorhodon,
du grec kunόs (chien) et rhόdon (rose)

Lorsque dans un peu moins d’une semaine, vous lirez ces quelques lignes, je repenserais alors à l’écriture de ce post, post où j’aurais pu tout simplement vous décliner tous les bienfaits du fruit de l’églantier et de ses vitamines. Celui du rosier des chiens. Fameux. Mais commençant juste à écrire, mon esprit vagabonda derechef, comme souvent, sur mes origines bretonnes.

MALLOZH GAST ! Garder un chien de sa chienne gentiment, comme le dit souvent, grommelant doucement, gentiment, le cousin Walrus quand il défie ici, pianotant sur son ordi, et que son chien, qui je le rappelle est une chienne jolie, ne fait que de l’embêter.

Il me vint donc l’idée de flâner sur mon arbre généalogique - fruit joli aussi de tant de mes sueurs. Car je remarquais que kunos en grec ressemblait fort à ki, kon le chien en breton. Je voulais voir si j’avais des chiens et des roses. Comme ancêtres. Alors, j’y frôle dans les années 1600-1650 deux Louis Conan (chien), une Marguerite, un Jean Tanguy (chien de feu) et une Jeanne. Et un autre Jean, Rosnen (rose) lui. C’est dire.

Une histoire canine de choux et de roses, certes, mais sachant surtout que l’un de ces ancêtres est un implexe, un doublon, car mon grand père et ma grand mère en descendent, et sont donc cousins. Fort heureusement la branche de ma grand mère passe par un certain Joseph Boulc’h, dont la femme Marie - celà ne s’invente pas - vers 1820 fauta en adultère de feu avec le petit fils d’Ignace. Du coup, il n’y a plus de cousinage réel chez mes grands parents, donc.

En effet, vers 1750, Ignace Wilhem, chef mineur autrichien, venant du Tyrol avec son savoir-faire, s’installa dans la région. Épousant au passage une jolie bretonne. Du sang neuf allait couler. Ouf. On a eu chaud. Pensez !

Au village du Guilly, celui de mon père, où tous ses ascendants finirent par arriver, les uns après les autres, le parler breton est très spécial, petit chien se prononce ki bine. Au lieu de ki bihan, comme tout le monde le dit. Même vous. Les missionaires gallois du Guilly, qui avant de venir avaient bien appris le breton, en perdirent leur latin. Quant aux futures ouailles ...

Enfants en vacances, on retrouvaient tonton Robert qui avait avec lui un tout nouveau chien chaque année. Chaque fois, on demandait son nom : Ki bine ! répondait imperturbablement l’oncle breton taiseux. Bon.

Roz-agroaz, l’églantine pousse dru dans les haies au Guilly. Certes. Mais ici la douceur de la rose et la gentillesse du petit chien ont fait place aux méchants loups. Juste les épines, donc. Ce village était isolé une bonne partie de l’année. Les gens alentours parlaient des loups du Guilly. Pas sympas du tout les habitants du village, non, même vus par les autres bretons.

https://www.croirepublications.com/blog/un-jour-dans-l-histoire/22-juin-1932-l-ecole-evangelique-baptiste-du-guilly

http://protestantsbretons.fr/docs-cont/lecole-protestante-du-guilly-en-1900/

Et puis l’école du Guilly devint célèbre dans la région. Nombre d’enfants y passèrent, y apprenant contraints un bon français, dit et écrit. Les certificats d’étude furent légion.

Aujourd’hui c’est comme tout, il n’y a plus rien, ne restent de l’école - amenée neuve en grands kits par bateaux, du pays de Galles - que les ruines.

Et autour de la cour, dans les haies redevenues sauvages, naissent, poussent, s’enroulent, fleurissent, fructifient et meurent, les je vous le donne Émile.....

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Salle de classe
Sur le noir des tableaux
Aux paysages des enfants sages,
Voici les écoliers, qui
Des images vont à pied,
Par les chemins,
Dans la neige des kilomètres
Chronomètres.

Mains gelées au charbon, qui
Dans la classe y rougeoie,
Y rugit, aux lettres d 'alphabet.

Pleurs et rires en ponctuation,
En dictions et dictées, abhorrées, qui
En punitions, qui

En cour de récréation …

Bancs d 'école aux bancs de bois
Aux abois, d 'essais, qui
Bonnets d'âne et blancs bonnets,
En bons points,

Sous les sarraus, lisent encore ...

Cavalier

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Conan : Surtout porté dans le Morbihan, c'est un vieux nom de personne breton formé sur le mot "kon" (= chien et par métaphore guerrier). Plusieurs chefs et un saint bretons ont porté ce nom. Variantes : Connan, Connen. Dérivés : Conanec, Conannec, Connanec.

Tanguy : Nom breton très répandu dans le Finistère. C'est un nom de personne formé sur les racines "tan" = feu et "ki" = chien (sans doute avec le sens de guerrier ardent). Le nom a été popularisé par un saint légendaire du VIe siècle. Variantes : Tangui, Tanguis."

Rozen : Porté dans le Finistère et le Morbihan, le nom peut désigner en breton soit la rose, soit une colline à végétation de lande (breton roz dans les deux cas). On préfèrera ce dernier sens, il s'agirait donc d'un toponyme devenu nom de famille.

Avec Ignace VILHEM on touche l’histoire du secteur de production des non ferreux (plomb, cuivre, zinc et argent) dans l’espace technico-économique français du XVIIe. En effet, l’Administration française n’avait de cesse de relancer une activité minéro-métallurgique qui s’était éteinte au cours du XVIè siècle. Mais où prendre modèle ? Le royaume de France, ne disposait d’aucune tradition. La minéro-métallurgie allemande va représenter un exemple incontestable. Et les efforts furent payants : en fin de siècle, le royaume produisait 1.500 tonnes de plomb brut et 2 tonnes d’argent, une production essentiellement localisée en Bretagne (Le Huelgoat- Poullaouen, Pont-Péan, Chatelaudren). Ces mines et fonderie travaillaient essentiellement pour l’Armée et la Marine. La fonderie de Baigorry fut ré ouverte en 1728, une concession royale étant accordée à M. Beugnière de la Tour. Ignace partira travailler un moment dans les mines de Banca (mines de cuivre). C’est à proximité de cette fonderie qu’un noyau humain s’était établi fondant ainsi le hameau de « La fonderie » qui faisait partie de St Etienne de Baïgorry ou naîtra Christophe son fils. Ignace mourra en Espagne car en 1768 les français avaient fondé une société pour l’exploitation des mines argentifères de Guadalcanal. Rechercher tous les actes correspondants ... 

L’intérieur de la salle de classe du Guilly vers 1900-1905. C’est une classe unique et mixte dont les effectifs approchent les 70 élèves. Au fond, Henri Chopin. (photo fonds privé Jenkins-Le Roux).


5 commentaires:

  1. Ça c'est du beau boulot ! Tu devrais bien t'entendre avec l'Adrienne qui, elle aussi, creuse profond dans le tronc de son arbre généalogique.
    Et il faudra que je pense à appeler mes petites-filles "Bine" : ce sont des Le Bihan ! :-)

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  2. Eh ben ! Moi qui crains toujours d'écrire trop long ! Mais ce n'est pas un reproche parce que c'est passionnant, ce que tu racontes : la généalogie est, elle aussi, un sacré poil à gratter !

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  3. On part des gratte cul et on arrive aux tondus ! Enfin presque. Je remarque qu'il n'y a pas beaucoup de filles dans cette classe. Et fait surprenant : elles ont la tête couverte. Les temps avaient changé dans les décennies dernières puisque les célibataires corréziens ou des départements voisins allaient chercher femme en Bretagne. ;-)
    J'ai lu ton texte avec grand intérêt Cavalier. Et j'ai particulièrement aimé ton poème-hommage aux écoliers d'antan.

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  4. Vraiment magistral autant que passionnant ! L’école et ses sarraus parlent à mon cœur et la généalogie, l’origine des noms me passionnent. Mais... il me semble me souvenir de textes où tu évoquais d’autres origines que bretonnes, en raison du fait que, comme moi (et de nombreuses personnes, heureusement), tu as certainement plusieurs origines.

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  5. Casse-tête passionnant ! Que de recherches dans les archives !!!

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Ont examiné le vitrail en détail

       TOKYO ;