Encore une journée caniculaire en ce mois de juillet. Émilie profite de quelques jours de vacances chez ses parents en Auvergne. Bastien, son compagnon lui manque, c'est vrai et elle pense constamment à lui, obligé de travailler à Paris. Pas de congés pour lui cette année. Son nouvel emploi à la banque ne lui a pas permis de la suivre dans le Cantal. Dommage. Mais elle est bien décidée à tirer le meilleur parti de ses deux semaines pour récupérer après la vie parisienne trépidante.
Comme chaque après midi, la jeune femme prépare son sac à dos en y enfouissant une serviette de bain, un livre, un fruit et son téléphone. Elle longe la rive d'un ruisseau qui serpente tranquillement à travers les prairies. Les belles Salers la regardent passer en ruminant. Écrasées de chaleur, elles ont choisi l'ombre des aulnes et des chênes pour se reposer.
Émilie rejoint rapidement la petite cascade qui dévale les rochers en surplomb pour se jeter en bouillonnant dans la rivière. Comme il fait frais ici ! C'est un vrai paradis pense la jeune femme en exhalant un soupir de satisfaction. Elle connaît cet endroit depuis l'enfance. Il était déjà son refuge quand elle avait besoin de solitude.
Alertée par un cri aigu, elle tente un regard au dessus des arbres mais les rayons d'un soleil ardent lui font de l'œil à travers les ramures. Elle pose machinalement en visière ses mains croisées sur son front. Ainsi elle peut mieux observer le vol d'un milan royal qui plane dans le ciel pur avec souplesse et majesté. Admiration. Émotion. Quiétude. Amour inconditionnel de la Nature. Émilie est submergée par une vague de bonheur intense.
Elle atteint bientôt son coin rien qu'à elle, son havre de paix, Au pied de la cascatelle, une baignoire naturelle a été façonnée par des siècles de déferlement d'eau. Elle pose son sac, se déshabille promptement et plonge dans ce bassin accueillant. Comme toujours elle frémit au contact presque glacé de la source. Très vite, elle s'ébat avec délice dans l'onde stimulante.
Après son bain vivifiant , Émilie étale sa serviette sur la mousse. Elle est enivrée par les effluves de menthe sauvage piétinée tout autour. Elle ne tarde pas à s'endormir sur son livre grand ouvert.
Un grondement soudain la tire de son sommeil. Elle se redresse, ne sachant plus trop où elle se trouve. Reprenant ses esprits, aux aguets, elle constate avec effroi que l'atmosphère sereine qui régnait il y a peu a subitement changé. De gros nuages noirs et menaçants courent au dessus d'elle emportés par un vent tourbillonnant. Les arbres se courbent sous la violence des rafales. Même la cascade semble s'être mise à l'unisson et rivalise avec le tonnerre pour produire un fracas assourdissant. Des éclairs fulgurants, blancs ou violacés fendent l'horizon et se perdent. L'orage atteint son paroxysme quand une pluie serrée s'abat sur le sol. Émilie ramasse promptement ses affaires et se réfugie dans un encorbellement de la roche d'où elle peut admirer en temps ordinaire le Puy Mary.
Au bout de quelques minutes, le silence. Tout redevient calme comme s'il ne s'était rien passé. Seules quelques gouttes s'échappent des feuilles et tombent mollement sur le sol. Le soleil reprend sa place là haut, auréolé de minuscules nuages pâles qui disparaissent bientôt.
Cheminant vers le village, Émilie regarde, loin devant elle, des langues de brume vaporeuses et mouvantes partir en rampant à l'assaut du Puy Mary.
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