La 
petite route serpente sur la lande. Elle se gorge encore de l’or des 
genêts nains. Près du col, tu te gares doucement le long d’une grande 
haie d’ajoncs fleurie. Protègeant un maigre champ. Alors, tu suis le 
sentier qui grimpe à travers la lande au mont Roc’h Trevezel. Et là, 
quelle vue ! 
Le 
soleil se couche sur les monts d'Arrée. Au lointain, une grande auréole 
marron orangée, l’enveloppant, confond encore le ciel rouge sang avec 
les collines métalliques bleutées. Tous les détails s’estompent, se 
désagrègent. Seule une fine ligne cuivrée, furtive, scintille sur 
l’horizon et démarque, pour un instant, l’éther, du chaos des mamelons 
pierreux. La lande ocre s’assombrit de traînées glauques et profondes, 
puis d’ombres fugaces qui glissent telles des ondes en vagues de terreur
 sur l’océan rouillé.  
L’Ankou
 et sa meute de lièvres blancs prennent possession des lieux. Ils 
partent à ta recherche. Détourne ton regard si tu les aperçois. 
Incliné
 près de toi, un bloc de granit, grand menhir rose et gris, entouré de 
buissons de genêts et d’ajoncs dorés, se détache devant les hautes 
aiguilles échancrées, agressives, qui lancent leurs doigts tendus vers 
l’azur encore mauve. Pas un nuage n’est resté là. Un silence total 
s’étend et t’oppresse. L’Ankou rôde quelque part. Tout s’enfuit. Des 
bruyères brisées, des épines d’ajoncs lacèrent tes jambes nues. Des 
trous dérobent leurs mousses noires et spongieuses sous tes pas pressés.
 Des pierres traîtresses retardent tes fuites en vaines retraites. 
Tout 
l’univers se meurt avec toi. Le manteau de la nuit te traverse. Ta lampe
 de poche s’étiole. L’obscurité éteint tes yeux. Ta voiture n’est plus 
là. Ta voiture s’est perdue. 
"Wig ha wag ! Wig ha wag !"
Très belle évocation.
RépondreSupprimerQuand nous étions en vacances dans le Trégor, nous avons poussé jusqu'aux Monts d'Arrée : spécial comme région ! Mais j'ai retrouvé ma voiture : nous sommes repartis avant la nuit ;-)
Un tableau saisissant de beauté et d’étrangeté et un paysage où les légendes nous enveloppent et nous hantent...
RépondreSupprimerah! les monts d'Arrée! quels bons souvenirs!
RépondreSupprimer(faudrait que j'y retourne :-))
Quel beau texte poétique et mystérieux ! Un brin oppressant aussi. J'adore !
RépondreSupprimerJe confirme l'atmosphère bien décrite ici. Le jour où j'ai fait le tour du lac de Brennilis où se situe la porte de l'enfer, je n'étais pas très rassuré ! ;-)
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