samedi 30 août 2025

ENTRE DEUX MONDES (Marie Sylvie)

   



            Ce récit est né d'un mur. 
Un mur brun, basané, quelque part à Città di Castello. 
Sur sa peau rugueuse, une inscription :
"Sono solo e triste,  il 06-1-09 ". 
" Je suis seul et triste, le 06-1-09 ".

Et dans ce cri figé,  j'y ai vu autre chose :
Le ventre arrondi d'une grossesse, la solitude d'un être encore invisible, l'angoisse d'un bébé qui hésite à naître dans un monde abîmé. 
Ce récit est sa voix.
Une voix qui parle depuis l'intérieur, depuis ce lieu secret où l'amour protège mais ne peut retenir, les pensées d'un bébé encore à naître, seul mais enveloppé, qui redoute de franchir la porte vers la vie des hommes. 



     

              Avant les cris, avant les regards, avant même le souffle, il y a ce lieu : Le ventre. Un monde clos, doux, palpitant. 
Et dans ce monde, une conscience s'éveille. 
Elle écoute les échos du dehors, elle devine les blessures de la terre et hésite.


              《 Je suis là, lové dans le velours chaud d'un silence battant. 
Un cœur me berce, un souffle m'enlace. 
Je suis une pensée encore floue, un soupir d'étoile en attente. 
Et pourtant, déjà,  je sens le tumulte derrière la porte.

Le monde des hommes m'appelle mais je n'ai pas envie. 
Je l'entends gronder ce monde. 
Il parle fort, il court vite, il oublie souvent. 
Il salit la terre qui le nourrit, il se bat pour des idées qu'il ne comprend plus.

Moi, je suis bien ici !
Dans ce cocon de chair et de lumière tamisée, je suis seul, oui, mais je suis entier. 
Protégé par l'amour pur d'une mère qui ne doute pas.
Elle me parle sans mots, elle me chante sans voix.

Pourquoi naître si c'est pour respirer un air blessé ?
Pourquoi ouvrir les yeux si c'est pour voir les cieux troués par les bombes ? 
Je suis un rêve encore intact, et le monde des hommes me semble trop vieux pour moi.

Mais peut-être ....
Peut-être qu'un jour je serai la goutte d'eau qui nettoie, le rire qui répare, la main qui refuse de frapper. 

Alors,  doucement, je m'approche de la porte.
Pas pour fuir ce ventre mais pour tenter, malgré tout, d'y semer un peu d'innocence. 》



          Naître, c'est accepter de quitter l'éternité pour apprendre à aimer dans le chaos.



 

2 commentaires:

  1. Il va avoir bien du boulot, ce bébé messianique...

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  2. naître, c’est choisir d’aimer malgré le chaos.

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Ont-ils été titillés par l'horloge ?

         Ghislaine ; TOKYO ; François ; Lecrilibriste ; Marie Sylvie ;