
Adrienne en septembre dernier, m’a dit en commentaire sur mon blog :
« Excellent personnage, ce mulet Finistère! il faut le garder »
Je voulais le jetter aux orties, mais en fait non, je vais le garder encore un peu … Ici on le voit en fin d’histoire avec Achille Zavatta sur le blog de La Licorne
Le Tonnerre ? Oui. Qui n’a pas un jour au moins compté les secondes entre l’éclair soudain et aveuglant et le grand boum badaboum d’à côté ? Alors, s’inspirant encore du film « Un jour sans fin » et guidée par les codes de la BD aussi bien que de la fable, mon histoire, l’Oiseau-Tonnerre, explorera de façon linéaire, mais en recommençant souvent au point de départ, les déboires d’un petit groupe de touristes français, belges et québecois, humains et mulets entêtés, pris dans le ressac du temps.
Chaque matin, tout recommence : le transistor grésille un inamovible « I Got You Babe », une tempête capable de déclencher les éclairs, le tonnerre et les pluies salvatrices, menace au loin, le petit mulet, lui, rêve de virtuosité musicale chez une grand-mère amérindienne, professeur de solfège, et la flore locale défie la chronologie pour pousser, refleurir comme un rêve sans fin qui envoie des signaux magiques.
L’Oiseau-Tonnerre ou le Mulet qui marchait – le port de travers
(conte à rebrousse-temps, à l’usage des touristes mystiques et des mulets réfractaires)
Page 1 – Finistère en Amérique
Au lever du soleil, le petit mulet Finistère se réveille dans un décor qu’il ne comprend pas. Ce n’est plus le Mont Sainte-Odile en Alsace, mais ici une plaine d’herbes blondes, avec un panneau « Welcome to South Dakota » planté de travers.
Le transistor diffuse encore I Got You Babe.
Finistère marmonne :
– Encore ce fichu bol tibétain qui résonne à
chaque coup de tonnerre. On dirait que même Bouddha a pris un abonnement
météo. Il est pire qu’Albert Simon.
Le berger alsacien, lui, mâche une paille en regardant l’horizon.
– Regarde, Finistère. Le Concours de pêche du Missouri commence dans une heure.
– Je suis un mulet, pas une truite !
Autour d’eux, des touristes français et belges photographient les bisons empaillés du musée local.
Ils ont fait quinze heures d’avion pour contempler du plastique peint.
Une nourrice québecoise en tongs lit Peau d’ourse à voix haute :
– « Celui qui pense droit marche de travers ».
Finistère hoche la tête :
– Et celui qui marche de travers finit souvent dans un aéroport sans bagages.
Page 2 – Le Pèlerinage du Tonnerre
Un à un, les jours se répètent.
Chaque matin, Finistère rêve qu’il entend sa mère à travers les ondes.
« Quatre jours sans ma mère, et pourtant j’entends encore sa voix dans le grésillement du transistor », ânnone-t-il.
La bergère Gabrielle médite sur un rocher, un bol tibétain sur les genoux.
– C’est ici qu’habite l’Oiseau-Tonnerre, gardien du ciel et maître des tempêtes.
Finistère :
– Moi, j’habite la réalité, et elle penche du mauvais côté.
Un chien bloque la route, impassible, au milieu du chemin.
Gabrielle soupire :
– Signe du destin.
Finistère :
– Ou simplement un chien qui se fiche du destin.
Le Sachem du coin arrive, drapé dans une peau d’ourse.
Il s’appelle Tant Mieux : Ogimaa en lakota , ce qui, selon lui, signifie « un avenir radieux ».
Il parle peu. Très lentement, il déclare :
– Entre toutes les tempêtes, il faut choisir celle qui lave les yeux.
Puis il repart en silence, laissant derrière lui des touristes émus qui croient avoir rencontré un figurant du parc d’attractions voisin.
Page 3 – Le Messager
Le quatrième matin, la plaine est craquelée de poussière.
Plus un nuage, plus une mouche : seulement le vent, chargé d’électricité et de sable.
Finistère, couvert d’un drap de peau d’ourse bien trop lourd pour lui, tire la langue.
Gabrielle déclare d’un ton solennel :
– Il faut envoyer un messager à l’Oiseau-Tonnerre.
Les touristes applaudissent : enfin une activité spirituelle.
Un Belge propose un drone. Un Québecois, plus mystique, suggère un pigeon.
Mais le Sachem Tant Mieux-Ogimaa, très lentement, désigne Finistère.
– Le mulet. Il a marché de travers, il pensera droit.
Personne n’ose contredire ni le vieil homme ni Jean Dypréau.
Finistère hausse les épaules :
– Tant pis. Tant mieux. Allons-y.
Il grimpe la colline, en grommelant contre le vent, les moustiques et sa destinée d’animal de fable.
Arrivé au sommet, il découvre une stèle de pierre noire. Gravé dessus, un seul mot :
« Respect. »
Il ne sait pas lire, mais il devine. Il baisse la tête, frappe le sol
du sabot, et le bol tibétain, resté en bas dans les bagages, se met à
vibrer tout seul.
Un grondement éclate.
L’air se déchire.
L’Oiseau-Tonnerre surgit dans un tumulte de plumes et d’éclairs. Ses yeux sont comme deux orages, sa voix est comme un tambour.
– Les humains ont oublié la gratitude, tonne-t-il.
– Je suis un mulet, répond Finistère.
L’Oiseau-Tonnerre le fixe.
– C’est mieux. Vous les mulets êtes têtus, mais honnêtes.
Alors il bat des ailes, et le ciel s’ouvre enfin :
la pluie tombera, les plantes renaitront, les touristes sortiront leurs parapluies et filmeront la révélation.
Le Sachem sourit :
– L’équilibre est revenu.
Le chien, assis au milieu du chemin, pense :
– Jusqu’à la prochaine boucle.
Page 4 – L’Oiseau et la Boucle
Le matin, le ciel s’assombrit.
La voix du transistor annonce :
– « Bulletin spécial… le miracle aura lieu dans trente secondes. »
Les touristes lèvent leurs téléphones.
Rien.
Sauf un grondement lointain.
Finistère, excédé, retire la barrette coincée dans sa crinière et la jette dans le vent.
Le bol tibétain vibre.
Une plume géante tombe du ciel.
Le chien se lève, philosophe, et dit – oui, je parle maintenant – :
– Celui qui pense droit marche de travers.
Un éclair.
Et puis plus rien.
Et puis, le jour finit de se lèver encore, le ciel sourit et cette fois, quelque chose a changé :
Le transistor diffuse Thunderstruck d’AC/DC, et non plus I Got You Babe.
La boucle temporelle est rompue.
Le mulet Finistère rit, un peu fou, un peu libre. Après tout.
Debout, il joue du piano debout, sur un piano d’église abandonné et murmure :
– Sur cette terre où les étoiles tombent, je crois que j’ai fini par marcher – le port de travers.
…

Foire aux questions
Qui est l’Oiseau-Tonnerre dans la mythologie autochtone ?
L’Oiseau-Tonnerre est une créature spirituelle puissante, souvent vénérée parmi les nations algonquiennes, lakotas et d’autres peuples amérindiens. Il est gardien du ciel, maître des tempêtes, capable de déclencher les éclairs, le tonnerre et les pluies salvatrices.
Comment l’Oiseau-Tonnerre restaure-t-il l’équilibre dans cette légende ?
Dans le récit, après une longue sécheresse, les peuples envoient un messager sur une montagne pour implorer l’aide de l’Oiseau-Tonnerre. Il leur révèle que leurs offrandes, prières et respect de la Terre Mère peuvent réveiller les forces naturelles. Il apparaît alors, déclenche une grande tempête, fait tomber la pluie et restaure la vie sur la terre.
Quel message spirituel cette légende transmet-elle aux lecteurs aujourd’hui ?
La légende rappelle l’importance de respecter la nature, d’honorer les esprits de la terre, et de reconnaître notre responsabilité collective. Elle enseigne que les catastrophes (comme la sécheresse) peuvent être le résultat d’un déséquilibre spirituel, et que l’humilité, le rituel et la gratitude peuvent restaurer l’harmonie entre les humains et le monde naturel. Oui, mais bon, ce ne sont que des mots, vides, en effet la terre a vécu et vivra bien sans nous. Et avec bien d’autres catastrophes dont nous n’avons pas eu, et dont nous n’aurons même pas non plus, la moindre idée.
la nature envoie des messages à ceux qui écoutent et même à ceux qui n'écoutent pas, après tout est question d'interprétation "tonnerre de brest !" 😂⚡⚡⚡
RépondreSupprimerAinsi parlait le shaman !
RépondreSupprimerUne belle occasion de visiter ou revisiter la légende l'Oiseau-Tonnerre. Les jolies illustrations qui accompagnent ton texte nous ramènent aux livres de contes de l'enfance.
RépondreSupprimerTrès beau récit imagé qui m'a permis de découvrir un animal mythique mystérieux !
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