Mon père avait un ami qui se prénommait André.
Cet André, question de simplifier les choses, avait un fils qui s'appelait... André !
Ce second André et moi étions amis, question de génération...
C'est avec lui que j'ai fabriqué ma première dose de poudre à canon (recette chinoise : salpêtre, charbon de bois et soufre). C'est avec lui que j'ai pratiqué mon premier troc : une mitraillette Schmeisser enrayée contre un casque américain. C'est avec lui que j'ai appris à me passionner pour le Jazz. C'est avec lui que j'ai assisté à Charleroi au seul concert de Count Basie de mon existence. C'est ensemble que nous avons méprisé le rock'n roll naissant. C'est chacun de notre côté que nous sommes devenus chimistes, lui industriel (il faisait dans les balbutiements du pare-brise chauffant), moi de laboratoire (je faisais n'importe quoi) dans deux établissements séparés de la même institution scolaire.
"Et les bigoudis là-dedans ?" vous écrierez-vous fort raisonnablement : c'est quand même bien moi qui ai choisi ce sujet à partir en boucle...
Vous inquiétez pas, j'y viens : mon copain avait une voisine que nous apercevions régulièrement dans le jardin contigu parée de ces accessoires capillo-modeleurs. Tout le monde l'appelait Ginette sauf mon copain qui l'appelait "La môme Bigoudis".
Comme c'était prévisible, après l'avoir charriée sur ce thème pendant quelques années, il a fini par l'épouser.
Ils ont eu quelques enfants et, pour faire un compte rond, j'imagine, la môme Bigoudis et lui ont joué famille d'accueil pour quelques autres. Je m'en souviens parfaitement vu le nombre de cadeaux dont nous nous munissions quand nous leur rendions visite.
Ça fait bien des années aujourd'hui qu'André est allé rejoindre Satchmo, Bix Beiderbecke et Boris Vian au paradis des cornettistes... (Je me demande ce que sont devenus les centaines de 33 tours de jazz qu'il possédait. Il avait même un copain pilote de ligne qui lui en avait ramené des États-Unis).
Eh oui : j'ai plus d'amis à qui on a pu réciter "Ashes to ashes, dust to dust" que de bien vivants.
Bah, l'essentiel demeure malgré tout :
Des bigoudis à Count Basie il y a un grand pas que tu franchis allègrement
RépondreSupprimerJ'ai hérité des bottes de sept lieues ! :-)
SupprimerC'est ça qui est bien avec la musique : on peut rester fidèle à ses amours de jeunesse !
RépondreSupprimerEt quelle musique ! ;-)
SupprimerGinette se laissait admirer avec ces objets de torture sur la tête ? Ce n'est pas très sexy. L'essentiel était que ça plaise à ton copain André...
RépondreSupprimerElle ne venait pas au jardin pour se faire admirer en bigoudis ! :-)
Supprimeradorables histoires et souvenirs! j'ai bien, bien aimé :-)
RépondreSupprimerJ'ai déjà eu l'occasion de constater combien Madame est bon public...
SupprimerToute une époque : jazz, bigoudis étaient liés comme "Cigarettes, whisky et p'tites pépées" ! Et souvenirs émouvants...
RépondreSupprimerC'est marrant, j'ai comme l'impression que mes souvenirs deviennent de plus en plus anciens, je me demande d'où ça vient ! :-)
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