samedi 6 septembre 2025

Défi #888

  

Un petit tour chez les potentats indiens ? 

 

Nabab 

 


 

Ont-ils été titillés par l'horloge ?

 

  

   

Ghislaine ; TOKYO ; François ; Lecrilibriste ;

Marie Sylvie ; Walrus ; Kate ; Clio 101 ;

Joe Krapov

  

Une Coquille en héritage (Joe Krapov)

 




Heureusement que je me suis intéressée, un temps, à la généalogie de ma belle-famille ! Même si je ne l'avais jamais rencontrée, je savais que la tante Emmanuelle était la soeur de la mère de mon mari, François Homais, et qu'elle approchait de l'âge canonique de cent ans. Ça ne servait pas à grand chose, mais quand ce matin là, le téléphone a sonné et que le notaire, après s'être présenté, m'a annoncé avec les précautions d'usage que « ce matin, Emmanuelle Bovary est morte », ça ne m'a pas causé un grand choc et je savais « dekikikozé » comme écrivent mes petits enfants.

Maître Corboz, c'était là son nom, a poursuivi sur un ton quelque peu sentencieux :

- Elle a tenu à ce que tous ses neveux et nièces assistassent à ses funérailles qui auront lieu à Marcilly le lundi 1er septembre à 15 h 00 à l'Église. Toute la famille se réunira ensuite à 17 h 30 en mon étude, sise numéro 9, le bourg, pour l'ouverture du testament.

- Très bien, maître, je vais en parler à mon mari, nous y serons peut être.

- Soyez y sûrement ! Ne pourront hériter que les membres de la famille présents lors de la lecture de cette pièce.

- Bon, ben d'accord, nous y serons sûrement.

Mon mari, François Homais, est le troisième d'une lignée de cinq enfants. Il est le seul garçon, situé en position trois, au milieu de quatre filles. Ils exercent tous et toutes une profession médicale. François est pharmacien, son père était médecin, certaines de ses sœurs le sont ou l’étaient aussi.

La tante Emma était infirmière. Elle est restée célibataire toute sa vie et on ne sait par quel biais elle se trouvait dotée, à l'heure de son départ en retraite, d'un joli capital qui ne cessa jamais de fructifier et qu'elle convertissait avec un goût certain, paraît-il, en mobilier de luxe. Nous-mêmes, installés dans une sous-préfecture prospère d'un département dynamique, nous ne manquons de rien, sans doute en vertu du très célèbre ruissellement macronien qui assure une belle prospérité à tous les gens de bien qui ne sont pas rien.

Mon mari n'entretient que peu de rapports avec ses sœurs, neveux et nièces et encore moins avec ses tantes perdues de vue. Voilà pourquoi j'ai été bien étonné de l'entendre me répondre, à l'annonce du décès, « OK ! Lundi, je me fais remplacer à la pharmacie et on va à Marcilly. C'est où ce bled ? ».

J'ai consulté Google et Google Maps. J’ai vu que c'était dans la Manche, donc en Normandie et j'ai rempli un sac de vêtements. Comme le temps là-bas est toujours à la mode « p’têt’ ben qu’oui, p’têt’ ben qu’non » j’ai embarqué nos capes de pluie en supplément de vestes et parures plus légères et pas trop colorées. C'était un enterrement quand même.


- Tu n'appelles pas tes soeurs pour proposer un covoiturage ? ai je demandé naïvement à mon mari.

- Et puis quoi encore? Elles habitent à différents endroits de la périphérie de Rennes et l'aînée - comment se prénomme-t-elle déjà ? Ah oui, Isabelle - a un labo à Trébeurden. Je ne vais pas faire du ramassage scolaire en plus ! Qu'elles se débrouillent entre elles si elles veulent !

Cela va faire quarante-cinq ans que je suis mariée à cet ours ! C’était juste proposé de mon cœur mais, de fait, je n'attends plus de miracle de ce corps... médical.

***

Le lundi matin, nous voilà donc partis revoir la Normandie de Stone et Charden. Le paysage est très vert, preuve qu'il pleut quand même encore par ici malgré ces stupides rumeurs de dérèglement climatique. Enfin, je parle de la partie juste avant Avranches, quand on prend la Départementale 976, après l'A84, qu'on passe à Launey, Ducey-les-Chéris et qu'on arrive... dans ce village minuscule où il n'y a même pas un café ou une auberge !

- Qu’est-ce qu’elle est venue faire à s'enterrer dans ce patelin ? peste déjà François. Où est-ce qu’on va grailler ?

On trouve justement une place sur le petit parking en face du cimetière, on descend. Pas un chat ! On pousse jusqu'à l'église : fermée ! Pas d'avis mortuaire, rien ! On cherche la mairie sans la trouver, il n'y a pas de nom aux rues, elles s'appellent toutes le bourg apparemment. Un panneau rouge indique qu'il faut partir à gauche pour la trouver mais il n'y a que des pavillons d'habitation tout le long de la route.

Au carrefour vers La Boulouze on aperçoit une personne de sexe féminin et dotée d'une brouette. « Une naine de jardin vivante ! », comme dirait mon François dans ses bons jours. Sans le savoir, elle fait office de représentante de l'humanité sur cette planète désertique.


- Madame ! Madame ! intercédé-je, nous cherchons la mairie ou l'étude de maître Corboz et nous voulons nous assurer que nous sommes bien au bon endroit pour la sépulture de Madame Bovary.

Tête ahurie de la Schtroumpfette. Je parle le charabia dans le texte ou quoi ?

***

Bon, OK, j'ai tout faux ! Il n'y a pas de notaire ici, il n'y a pas de Emma(nuelle) Bovary à habiter par ici. Et dans un pays nourri de crème fraîche et de doutes permanents, personne ne peut mourir tout à fait ni concevoir que cela puisse se faire.

François rage comme jamais ! On rentre à F.

***

Cette histoire m'intrigue. Le notaire n'avait pas l'air d'un plaisantin. Et qu'une centenaire décède fait partie des probabilités envisageables en ce bas monde. À la fin du repas improvisé, je monte dans le grenier où sont rangées les archives de la famille Homais. Ce nom de Marcilly me dit vaguement quelque chose.

Dans la boîte des photos d'enfance des sœurs Bovary, Emmanuelle et Madeleine, je trouve celle d'une église qui ressemble à un château fort, des clichés de gamines en robe blanche sur un bateau ou sur le port de La Rochelle, l'image d'un écrivain qui dédicace des livres. 


A tout hasard, je retourne la photo de l'église et je lis « Marsilly 1934 ».

Marsilly ! Marsilly avec un « s ». Après vérification cette ville se trouve en Charente-Maritime. Wikipédia m'apprend que Georges Simenon y a vécu entre 1932 et 1934. Est ce que j'en parle à François ? Est-ce qu'il est prêt à se fader 3 h 20 supplémentaires de bagnole à fond la caisse pour arriver à 17 h 30 chez le notaire et entendre le beau ramage de Maître Corboz ? Il est déjà de très sale humeur comme ça. Je choisis de ranger la photo dans la boîte où il ne met jamais le nez et de me taire pour toujours sur cette erreur due à une homonymie. Fin d'une drôle d'histoire.

***

Quelque temps après cependant, j'ai quand même téléphoné, en cachette, à ma belle-sœur Isabelle, celle qui habite à Trébeurden et qu'on n’est allés voir qu’une seule fois chez elle en quarante ans. Elle a fait le déplacement au bon Marsilly, celui avec l'église-château fort. Elle a vu le plumage du notaire, plutôt déplumé de fait tant il était "old school". 

On n'a rien perdu : tous les neveux et nièces sont déshérités. La Tatie a fait don de ses biens aux apprentis orphelins d'Auteuil-Neully-Passy ou une association de ce genre-là. François aurait été furieux d'apprendre ça, de voir que pour une fois, ça ne ruisselle pas dans son escarcelle. Moi, je suis rassurée sur la bonne marche du monde : si les célibataires s'occupent des orphelins, c'est qu'il n'est pas si mal fait que ça, finalement !


P.S. Ne trouvant guère de ressemblance du cliché walrussien avec les images de Google-images, je me suis retrouvé ici grâce à Google-recherche-par image :



Cette coquille des "Bidochon" m’a donnée l’idée de ce quiproquo !

Nuances de gris et de rouge (Clio 101)

  


Les jambes et les poumons en feu, le visage noir de larmes et le cœur battant à tout rompre, Onia s’effondra au sol. Dans ses oreilles, bourdonnaient encore les vociférations, les aboiements des chiens, le crépitement des torches et les insultes.

“Meurtrière ! “ Sorcière ! “ “Assassin ! “

Ses membres tremblants, elle se redressa à demi ; un frisson violent parcouru  son corps. Une forteresse la surplombait de sa masse, imposante et terrible. La muraille, aussi lisse que du marbre, n’offrait pas la moindre prise. La seule gouttière, si haute qu’elle devait se tordre le cou pour la voir en entier, ne permettait à aucun grappin de s’accrocher. Même le pilier de gauche avec son escalier en colimaçon, ne laissait pas entrevoir une ouverture. Ses yeux désespérés louvoyaient de l’horloge aux aiguilles figées dans un espace-temps inatteignable, à la façade qui semblaient ricaner de sa malchance.

Dévorée par l’angoisse, Onia se recroquevilla un peu plus.

Son cœur se tordit de nouveau quand un puissant coup de tonnerre fit vibrer la terre, répandant des ondes de choc sur la surface du plateau. Au même instant, l’écho des vociférations, aboiements, hurlements, crépitement de torches, retentit dans la nuit qui s’avançait. Tout espoir de retraite était désormais perdu. Perdue entre songe et réalité, elle percevait avec acuité son corps déchiré par les coups, ses flancs entaillés par les pierres et le fouet, son sang s’échapper de ses blessures. Déjà elle sentait poindre l’heure de son entrée dans le sommeil éternel.

Dans un gémissement, elle rampa vers le mur, dans l’espoir vain de se fondre en lui, d’entrer dans les ombres pour échapper à ses poursuivants. Accablée, appelée par les profondeurs, elle se glissa dans les ténèbres d’une petite arcade située sur sa gauche. En se mordant une main pour s’empêcher de crier, elle apposa, en tremblant, l’autre sur une minuscule porte.

Avec stupéfaction, elle vit apparaître un mince rai de lumière puis une voix sépulcrale retentit : 

-         "Venez, nous vous attendions."

Sans réfléchir une seconde de plus, elle se glissa dans l’interstice et disparut dans l’obscurité.

  

Et fort (Kate)

   

On dirait un château
plus ou moins beau
imposant
voire géant
surtout photographié
en contre-plongée
par Sieur
Walrus, quel honneur !
Combien d'efforts
a-t-il fallu pour le construire ?
Ce château fort
qu'aujourd'hui encore
on admire.
Mais qu'en déduire ?
Que tant d'efforts
de nos ancêtres
sont parfois à tort
gâchés par des êtres
qui veulent avoir l'heur
de bien faire
en nous donnant l'heure
en installant
à grands frais
une horloge moderne
dont on n'a que faire
affichant
un anachronisme complet
croyant animer une façade terne...
Tant d'efforts
nuisent à ce château-fort
en lui faisant du tort
et fort !
La photographie
dit ici toute l'ironie...

Mais le temps passe
comme un fou
c'est vrai il s'enfuit
mais où ?

Au Mont Dore je le photographie
avant de faire une impasse...
à la reine
qui réussira avec de la veine...
 

(cadran solaire sur une maison à Clermont,
loge du concierge de l'hôtel Le Sarciron au Mont Dore, juillet 2025)

  

 

 

Je m'en doutais... (Walrus)

  

En sortant de dessous les arbres, je suis tombé nez-à-nez avec cette bâtisse impressionnante, inquiétante même 

Et pourtant !

C'est une église, comme l'a découvert François qui vous dit ce qu'il en est dans son billet du jour. 

Évidemment, si vous voyez une église comme un endroit aux portes largement ouvertes au public, on peut comprendre votre confusion. 

Dans les environs de La Rochelle, on trouve de ces églises fortifiées parce qu'ils ont été au cœur des péripéties de la guerre de cent ans, suivie de celles de la guerre de religions.

Allez, je vous en montre une autre, à Marans :

 



Marrant, hein ?

Non ?

Bon, ben...  j'aurai essayé ! 

  

L'attente éternelle (Marie Sylvie)

  

 

 




            Parfois une simple photographie raconte une histoire bien plus grande. En contemplant ce mur patiné par les siècles et son horloge solitaire, j'ai vu naître un récit. L'histoire d'une attente, d'un espoir, d'une foi inébranlable malgré le temps qui passe ... et l'édifice qui s'use.
          Parfois, les pierres murmurent l'histoire de la patience. Ce récit en est une ébauche. 




Le mur de pierre est un visage de silence, une épitaphe de patience. Chaque crevasse est une ride du temps, chaque mousse un soupir de l'éternité. La bâtisse ne s'écroule pas d'un coup mais se défait goutte après goutte, telle une prière sans fin que le ciel ne semble pas entendre. 


Et au milieu de ce lent déclin, l'horloge. Elle ne bat pas l'heure, elle mesure l'absence. Ses aiguilles sont des ombres qui rampent sur le cadran, de longues mains qui désignent l'horizon vide où rien n'apparaît. Elles marquent les jours, les mois, les siècles d'un espoir qui ne se nourrit plus que de son propre écho.

Chaque tic-tac est un grain de sable qui glisse, un morceau de foi qui se détache. Le mur attend que l'attendu revienne mais le temps, lui, continue d'avancer, et dans son sillage, il laisse les pierres s'effriter et les cœurs s'alourdir telles des larmes séchées sur un visage de pierre.


             Dans l'intervalle de l'attente, 
             L'édifice se meurt, 
             Mais la foi, elle, reste immobile.


 

DU CÔTÉ DE L’ÎLE DE RÉ (François)

  




 

Voilà un édifice qui me fait penser,

A la charmante ile de Ré,

C'est en prenant la route des portes,

En allant jusqu'au bois de Trousse-Chemise,

Que ma balade a fait en sorte,

En voiture, de repasser par le pont,

Pour aller jusqu'à Thanon.

J'ai découvert cette église,

Elle se trouve à Marsilly,

Imposante, elle date du Moyen-Âge,

Toute en briques construite,

Monument historique depuis 1907,

Elle est aussi particulière par son aspect extérieur,

Tout comme son aspect intérieur,

Elle est originale à sa manière.

 

La visiter réveille des sentiments étranges,

A sa façon elle mérite des louanges.

 

 

Participation de Lecrilibriste

  

 

Io Sono solo e triste
Dans mon château haut perché
Avec mes murailles grises
Et les créneaux acérés
De ma forteresse blindée
Et mon horloge qui marque
Les semaines et les années
Les silences des journées
Rien ne pourrait m’arriver
Ma solo sono e triste
Rien ne peut me consoler
Mon amour s’en est allé 

 

Prince fier noble imprenable
Hostile à la société
Les portes j’ai verrouillé
Le pont levis j’ai levé
Et derrière les meurtrières
Les archers prêts à tirer
Guettent les malavisés
Qui oseraient approcher
Pour ma retraite troubler
Ma sono solo e triste
Rien ne peut me consoler
Mon amour s’en est allé

 

 

Sire Langlois (TOKYO)

   

En l’an 354 après J.-C., au sommet de sa forteresse battue par les vents, le très honorable Sire de Langlois fut soudainement pris d’une démence aussi spectaculaire qu’inattendue.

 

Convaincu que l’horloge solaire gravée au mur annonçait l’arrivée des extraterrestres (qu’il appelait alors « les esprits du fromage »), il ordonna à ses soldats de se coiffer de poêles à frire en guise de casques et de se préparer à l’invasion.

 

Pendant trois jours et trois nuits, il harangua les corbeaux, qu’il prenait pour ses ambassadeurs diplomatiques. On rapporte même qu’il signa un traité de paix avec une poule égarée dans la basse-cour, lui promettant terres et rentes en échange d’œufs en or.

 

À la fin, son peuple, fatigué mais amusé, décida de proclamer officiellement la « Semaine de la Folie Joyeuse », tradition locale au cours de laquelle chaque habitant devait imiter le Sire en hurlant des proclamations absurdes du haut des remparts.

 

C’est ainsi qu’à Langlois, on entend encore aujourd’hui résonner chaque année ce cri ancestral :

« Vive les poules ambassadrices !

 

 

 

Participation de Ghislaine

  

On raconte que l’horloge du vieux château ne sonne plus depuis des siècles.
Pourtant, certains soirs, les villageois jurent avoir entendu son carillon résonner, comme un écho venu d’un autre temps. On dit que lorsque ses aiguilles se remettent à tourner, une âme oubliée cherche à revenir parmi les vivant.

Depuis des générations, les habitants du village murmurent la même mise en garde;
"Lorsque l’horloge du château bougera, le passé viendra frapper à la porte"
Construite au sommet de la tour, cette pendule de pierre, figée depuis des siècles, n’a jamais marqué le temps. Pourtant, chacun sait que jadis, elle sonnait à minuit pour annoncer les apparitions de l’ancien seigneur dont personne ne connait le nom et l'existence.

De nos jours, les visiteurs rient de cette croyance, se moquent des vieilles histoires. Mais l’hiver dernier, après une tempête qui balaya la région, un promeneur affirma avoir vu les aiguilles s'activer à la lumière des éclairs. Depuis, les habitants disent que des ombres se déplacent dans les couloirs en ruine, et que des murs suintent une humidité glaciale dès que l’on fixe trop longtemps la pendule.

Les anciens chuchotent que si l’horloge recommence un jour à sonner, ce ne sera pas pour annoncer l’heure, mais le retour de celui qui n’a jamais quitté son château. Je voudrais bien savoir qui est ce seigneur d'antan !

Hier je suis allé voir cela à minuit tapante ! Je n'ai pas vu les aiguilles bouger mais je sais pourquoi ! Walrus a capturé le temps de la pendule en prenant la photo  ! Ce ne peut être que cela d'ailleurs ! Ou alors,
serait ce que personne ne l'a mise à l'heure depuis des lustres ? 

   

Défi #888

   Un petit tour chez les potentats indiens ?    Nabab